Des stages hospitaliers pour les futurs assistants en master de médecine générale ? C’est une obligation instaurée par l’Union européenne. Mais quels stages et pour quoi faire ? Réflexions de deux responsables universitaires de la formation en médecine générale, les Prs Didier Giet (ULiège) et Cassian Minguet (UCLouvain).
L’obligation pour les médecins généralistes en formation de passer au moins six mois en hôpital reprend cours à partir de l’année académique prochaine (2025-2026). C’est une exigence de l’Union européenne. La directive concernée prévoit un minimum de trois ans de formation en médecine générale, avec un minimum de six mois de stage en médecine générale et au moins six mois en milieu hospitalier.
Suspendue par Maggie De Block
La loi belge, qui a transposé la directive en droit national, précise que le stage hospitalier doit durer six à douze mois. Elle avait été suspendue par Maggie De Block au moment de la double cohorte, car on pouvait craindre de ne pas disposer de lieux de stage adéquats en nombre suffisant.
Cette mise entre parenthèses de la règle européenne va prendre fin. La cohorte des diplômés en médecine qui vient de sortir en 2024 est donc la dernière à bénéficier de cette non-obligation. Les jeunes diplômés qui entreront en spécialisation l’année prochaine devront s’y plier. Leur stage hospitalier pourra même durer jusqu’à 12 mois.
Ce n'est pas dans les douches qu'on apprend à nager
« À Liège, ce sera six mois », précise le Pr Didier Giet, responsable du département de médecine générale à l’université liégeoise, « pas un de plus, pas un de moins. » Mais la question est : quel stage et pourquoi faire ?
Ainsi, lorsqu’on pose la question au Pr Didier Giet, il répond que « ce n’est pas dans les douches qu’on apprend à nager ». Mais il ajoute que « c’est aux universités de faire en sorte que ce passage en milieu hospitalier soit utile aux deux parties, la médecine générale et la médecine hospitalière. »
Pour le professeur liégeois, il y a là une opportunité de favoriser une bonne articulation et un bon dialogue entre les deux secteurs. Cela concerne par exemple les phases d’admission et de sortie de l’hôpital. Les hôpitaux sont intéressés, mais il ne faut pas que cela se résume à un apport de main-d’œuvre. Le séjour en milieu hospitalier doit permettre aux jeunes, par exemple, de mieux se préparer à éviter les complications post-hospitalières éventuelles et à bien les gérer si elles surviennent.
Un stage au service des urgences
À l’UCLouvain, le Pr Cassian Minguet est favorable à un stage hospitalier dans la formation du futur généraliste. Mais il insiste sur la nécessité de bien choisir le lieu. « Le service des urgences, par exemple, peut constituer un endroit intéressant pour l’assistant. Celui qui n’a pas trop confiance en lui - ce n’est pas si rare - peut en retirer une meilleure assurance devant des circonstances un peu plus stressantes que d’ordinaire. Par ailleurs, c’est là que le futur médecin généraliste pourra rencontrer des pathologies importantes, vitales, à prévalence basse en médecine générale, comme un infarctus par exemple », ajoute le Pr Cassian Minguet.
Il insiste lui aussi sur l’importance d’un séjour professionnel en milieu hospitalier pour favoriser l’installation d’une interface optimale entre médecine générale et médecine hospitalière. « En plus de cela », dit-il, « ce séjour permet au futur généraliste de se créer un réseau de spécialistes avec lesquels il pourra collaborer plus aisément une fois qu’il volera de ses propres ailes.
Et un stage du futur spécialiste en médecine générale ?
Mais pour en arriver là, ne faudrait-il pas que le futur spécialiste hospitalier ait, lui aussi, la possibilité d’effectuer un passage par la médecine générale ? » se demande Cassian Minguet. « Prenons un ou deux exemples », explique-t-il. « Le gériatre a intérêt à connaître les réalités de la vie de la personne âgée à domicile ou en maison de repos. L’urgentiste comprendrait mieux la manière dont le généraliste gère les urgences... on pourrait encore citer plusieurs autres exemples. »
L’idée a déjà été suggérée au Conseil Supérieur des Médecins Spécialistes et des Médecins Généralistes. « Cela deviendra peut-être un jour une réalité. » Un autre projet est encore dans les tiroirs : celui d’une procédure de nomination des maîtres de stage hospitaliers destinés à participer à la formation des futurs généralistes. Cela aussi aboutira peut-être un jour.