Le projet de loi-cadre du ministre de la Santé Frank Vandenbroucke, révélé début juin par Medi-Sphère et Le Spécialiste, continue d’alimenter les tensions dans le monde médical. Plus de 2 500 médecins ont répondu en 4 jours à une enquête lancée par les deux médias et révèle une large opposition au texte. Jusqu’où les médecins sont-ils prêts à aller ? Une majorité se dit ouverte à des actions fortes, voire à une grève et une manifestation nationale, si le texte reste inchangé.
Le texte, qui prévoit notamment la suppression du conventionnement partiel, le retrait possible du numéro INAMI en cas d’infraction, le plafonnement des suppléments d’honoraires, la conditionnalité des primes à la signature de la convention, ainsi qu’un financement des syndicats lié au taux de conventionnement, est perçu par de nombreux médecins comme une remise en cause de leur autonomie professionnelle. Dans une tentative d’apaisement, le ministre Frank Vandenbroucke a déclaré ce week-end que « tous les acteurs seront impliqués », en référence aux organisations représentatives des médecins, tout en affirmant que le relèvement de certains tickets modérateurs « n’est pas un tabou ».
Mais le rejet des professionnels de santé est clair : 56 % des répondants estiment que le projet de loi-cadre ne contribue « pas du tout » à une plus grande transparence dans les soins de santé. Seuls 7 % y voient une contribution « très large ». Ce rejet est plus marqué chez les francophones (63 %) que chez les néerlandophones (47 %). Huit médecins sur dix (86 % côté francophone et 74 % côté néerlandophone) réclament un retrait pur et simple du texte et une réécriture complète en concertation avec le terrain.
Des points de rupture bien identifiés
Pour eux, les principales mesures jugées problématiques sont : la menace de retrait du numéro INAMI (59 %), la restriction du droit de fixer librement ses honoraires (58 %) et le conditionnement du financement syndical au taux de conventionnement (22 %). La suppression du conventionnement partiel est plus souvent citée par les francophones (15 %) que par les néerlandophones (8 %).
Quant aux points de rupture susceptibles de justifier des actions, la restriction de l’autonomie thérapeutique (31 %) et la menace de sanctions telles que le retrait du numéro INAMI (26 %) arrivent en tête.
Une atteinte à la médecine libérale
Plus de sept médecins sur dix (71 %) considèrent que le projet du ministre sape complètement le principe de la médecine libérale. Ce sentiment est plus marqué chez les francophones (79 %) que chez les néerlandophones (62 %). Les généralistes sont légèrement moins tranchés (66 %) que les spécialistes (72 %).
Vers un déconventionnement massif ?
Si 39 % des médecins sont déjà déconventionnés (40 % côté francophone et 37 % côté néerlandophone), 22 % déclarent qu’ils vont le faire « certainement » si le texte passe, et 24 % n’excluent pas cette option. Les médecins exerçant en solo (40,48 %) ou dans une pratique mixte (30 %) y sont les plus enclins.
Des actions très largement envisagées
Un mot n’est plus tabou : la grève ! Interrogés sur les moyens d’action, 57 % des médecins se disent prêts à un arrêt temporaire avec service minimum, 52 % à une grève administrative et 45 % à une grève totale. Une manifestation à Bruxelles recueille l’adhésion de 69 % des francophones, mais seulement de 44 % des néerlandophones.
En cas d’adoption du texte sans modification, 79 % des médecins participeraient à une grève nationale. Là encore, les francophones (86 %) se montrent plus déterminés que les néerlandophones (72 %).
Inquiétudes pour l’avenir de la profession
Quel avenir pour les soins de santé ? Pour 83 % des répondants, le projet de loi-cadre risque de décourager les jeunes médecins de s’installer ou de rester en Belgique. Ce sentiment est particulièrement marqué du côté francophone (91 %), mais aussi largement partagé chez les néerlandophones (74 %). Seuls 17 % des médecins interrogés estiment que la réforme n’aura que peu d’impact sur l’attractivité de la profession. Un constat qui renforce les craintes quant à la pérennité du système de soins.
Peu de bénéfices perçus
Les médecins s’inquiètent aussi de l’impact de cette réforme. Malgré l’ambition affichée de la réforme, peu de répondants y perçoivent des bénéfices. 59 % n’y voient strictement aucun élément positif. Les néerlandophones sont légèrement plus enclins à identifier certains apports : 38 % évoquent « plus de transparence sur les suppléments d’honoraires » (contre 22 % chez les francophones), et 19 % souhaitent une clarification du statut de conventionnement. À peine 3 % soutiennent un pilotage plus centralisé du système.
Que faudrait-il pour apaiser les tensions ?
À la question de savoir ce qui pourrait les convaincre d’accepter la mise en œuvre (même partielle) du projet, près d’un médecin sur deux (48 %) répond : « rien ». Toutefois, 30 % évoquent la nécessité de garanties claires sur leur autonomie et leur pratique, tandis que 14 % réclament une concertation transparente entre le ministre et les syndicats médicaux. Seuls 6 % se disent d’emblée favorables à la réforme.
Des lignes de fracture
L’analyse de notre enquête révèle des différences selon la langue, le sexe et l’âge. Les hommes sont plus souvent opposés « radicalement » au texte (53 %) que les femmes (43 %). Les personnes les plus critiques ont entre 36 et 55 ans. Les médecins hospitaliers flamands sont légèrement moins opposés que leurs homologues wallons, mais restent majoritairement défavorables.
Le dialogue suffira-t-il ?
Jeudi dernier, les syndicats médicaux ont rencontré le ministre Vandenbroucke et ont fait état de certaines avancées, tout en appelant à poursuivre le dialogue. Il reste toutefois à voir si cet appel à la concertation sera de nature à rassurer l’ensemble du corps médical…
> Découvrez l'intégralité des chiffres de l'étude
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Derniers commentaires
Charles KARIGER
16 juin 2025Le projet dit « VDBeurk » tente de répondre à une situation désolante mais prévisible depuis longtemps.
1./ Statbel : En 1945, lorsque l’âge de la retraite fut fixé à 65 ans, l’espérance de vie était de 65 ans pour les dames et de 61 pour les hommes. Il ne fallait donc pas financer grand’chose. Le système de financement par répartition (sur les épaules des actifs et de leurs employeurs) était raisonnable. Aujourd’hui, 84 et 80 ans. Pas besoin de super-calculateur pour saisir que c’est bien fini.
2.a/ En 1945, aucune insuffisance terminale n’était sauvée par une transplantation. 1960, rein. 1968, poumon. 1969, foie. 1973, cœur. Etc. Avec les traitements consécutifs pendant 15 à 25 ans, quel budget ? En gros, 100.000 euros cash plus 10.000 euros par an.
2.b/ Actuellement, plus de mille transplantations par an.
2.c/ Actuellement, plus de 80.000 coronarographies par an. Plus de 15.000 interventions à cœur ouvert,…
2.d/ Le coût de certaines immunothérapies anticancéreuses atteignent 100.000 euros.
2.e/ Etc, etc. Notre médecine de pointe engloutit des fortunes.
3./ En 1950 : environ 50.000 chômeurs ; actuellement plus de 250.000.
4./ Chaque fois qu’un « call center » est transplanté au Maroc ou en Roumanie, chaque fois qu’un entreprise nous fuit, le nombre de cotisants se réduit. Et simultanément, les taxes et impôts disponibles pour alimenter la Sécu fondent.
5./ Dans les cinq ans qui viennent, l’IA et les robots industriels, systèmes productifs qui ne cotisent pas à la Sécu, se généraliseront. Quel plan en tient-il compte?
Première conclusion : la Be n’est déjà plus capable de financer notre Sécu.
Problème supplémentaire, jusqu’ici personne n’a osé l’annoncer clairement à la population et LUI IMPOSER les douloureuses réductions de services adéquates. Au lieu de cela, on tondra les soignants.
Le plan dit « VDBeurk » sent bon l’économiste et le trotskysme.
Trotskyste, il entend en profiter pour « prolétariser les soignants » (le vieux projet socialiste de 1964). Exemple : raboter les revenus sans tenir compte de la durée effective d’activité.
(À quel âge un médecin COMMENCE-t-il à se constituer une Patientèle ? MG : bac+9. Neurochir : bac+12.)
Un "prolétaire-soignant" appauvri ET privé d’autorité OBÉIT et se tait.
Économiste, il prétend planifier l’avenir des soins en Be.
Planifier les moyens humains, combien de soignants, où, lesquels,… Il est certain qu’il sait déjà quelles nouvelles sous-spécialités seront nécessaires et comment les disposer comme Léon Trotsky disposait les régiments de l’Armée rouge... avant de capituler devant les troupes du Keiser.
Planifier les « besoins », d’après les variations de la population, les variations d’incidence des pathologies, les nouvelles maladies,… Il suffit de demander un rendez-vous pour une IRM pourtant bien PLANIFIÉE pour comprendre l’efficacité de notre Grand Planificateur.
Voici ce que nos universités, académies, ordre, etc semblent accepter. Un grand nombre de nos Consœurs et Confrères aussi.
Bien sûr, il est possible que ce superbe projet soit un os à ronger que le Ministre prévoit déjà de retirer après un baroud d'honneur en échange de nous faire ingurgiter un brouet moins immédiatement amer mais encore beaucoup plus néfaste à moyen ou long terme. Ce n'est pas un perdreau de l'année. il connaît les tactiques de négociation.
Diem Thuy LE HUU
16 juin 2025GREVE
Christian ZIEGELS
16 juin 2025Le ministre a demandé à comeos que les Bim aient une réduction de 25 %
dans les grands magasins d alimentation.??
Robin GUEBEN
16 juin 2025Selon la formule de la taille d'échantillon pour une population finie (formule de Cochran), la représentativité statistique de l'échantillon est répondue à partir de 383 personnes interrogées (pour 25077 généralistes et 37178 spécialistes). 2240 répondants dépasse de loin ce critère de représentativité. La formule de marge d'erreur indique une marge d'erreur de 2,1% avec un niveau de confiance de 95%.
Cette loi-cadre est rejetée à la quasi unanimité des avis ! La médecine d'État est rejetée ! Sinon la grève !!!
Philippe Burton
16 juin 2025LA GREVE
LA GREVE
LA GREVE
LA GREVE
LA GREVE
LA GREVE
Christine MAES
16 juin 20252240 répondants , soit seulement 3.5% de la population active MG (25.077) et spécialistes (37.178) , vraiment représentatif ... ?