Les Conseils médicaux à la croisée des chemins (Dr. J.de Toeuf)

La récente loi sur les Réseaux hospitaliers a confié aux Conseils médicaux de réseau un rôle prescriptif : la plupart des matières soumises à avis doivent être négociées avec le gestionnaire dans une concertation sur le mode paritaire. Une formidable opportunité. Mais pour réussir ce défi, les Conseils médicaux doivent professionnaliser leur mode de fonctionnement.

Les médecins hospitaliers sont confrontés à de multiples difficultés : croissance des honoraires en berne, et même réduction des recettes d’honoraires dans certaines institutions, augmentation des prélèvements par les gestionnaires pour cause de charges salariales (personnel infirmier, administratif, ouvrier) et parfois de laxisme dans la gestion. Les Conseils médicaux, sous pression sont trop peu souvent écoutés, et rarement en amont de la prise de décision par le gestionnaire.

La récente loi sur les Réseaux hospitaliers a confié aux Conseils médicaux de réseau un rôle prescriptif : la plupart des matières soumises à avis doivent être négociées avec le gestionnaire dans une concertation sur le mode paritaire. Formidable opportunité d’imprimer les priorités médicales dans la gestion, et nouvelle responsabilité.

L’existence d’un Conseil médical est imposée à tous les réseaux, la concertation devra se faire avant toute prise de décision sur les attributions de missions de soins aux hôpitaux des réseaux. Les normes d’agrément, compétence des régions et communautés, devront tenir compte des nouvelles prérogatives du Conseil médical de réseau.

Au sein d’un réseau, les médecins hospitaliers doivent rapidement, via leurs Conseils médicaux respectifs, définir le cadre de leur future collaboration : attribution des activités aux différents hôpitaux, mobilité des patients et des médecins entre les hôpitaux concernés, flux financiers. Il ne saurait être question de privilégier certaines institutions qui concentreraient toute l’activité lourde, condamnant les autres à une activité de base : ce serait y perdre les qualités et qualifications des équipes, en particulier dans des unités de soins plus intensifs. Au contraire, il faudra partager, dans l’intérêt aussi des patients et des familles, les activités d’expertise entre les différents hôpitaux du réseau : oncologie, mère-enfants, urgences, etc. Un bon maillage territorial est indispensable. Le réseau doit être capable de proposer une large offre de services. Le réseau deviendra un seul hôpital multisite, chacun des sites offrant les soins de base et une ou plusieurs missions lourdes (même des focus factories). Les protocoles d’accord entre hôpitaux du réseau devront décrire la façon d’assurer la continuité des soins au niveau de l’hôpital après un séjour dans un des autres hôpitaux du réseau, organiser l’activité ambulatoire (mobilité des médecins pour suivis lourds), définir les modalités de rétribution des médecins du réseau et celles de l’accès des médecins hospitaliers à d’autres hôpitaux du réseau pour y traiter leurs patients, etc. Il faudra aussi rédiger des protocoles collaboratifs avec les généralistes traitants et leurs collaborateurs de première ligne, donc des itinéraires diagnostiques et thérapeutiques transmuraux.

Les missions de soins suprarégionales doivent être réduites à la prise en charge d’hospitalisations pour des pathologies rares ou très exigeantes en ressources humaines et financières : greffes d’organes, chirurgie pédiatrique lourde (affections congénitales), oncologie pédiatrique, certains cancers de l’adulte, grands brûlés.

Pour réussir ce défi, les Conseils médicaux doivent professionnaliser leur mode de fonctionnement : leurs membres ont tout intérêt à suivre des formations diversifiées sur tous les aspects de la gestion, non pas pour devenir des gestionnaires, mais pour acquérir les outils de compréhension de l’entreprise hospitalière. En particulier, cette formation devrait être proche de celle attendue d’administrateurs membres d’un Conseil d’administration : pilotage des réunions, aplanissement des conflits, éléments de législation et de financement, accompagnement du changement.

Corollaire évident : les membres actifs du Conseil médical devront être rétribués pour cette activité qui les tiendra partiellement à l’écart de l’exercice de leur profession.

Vous souhaitez commenter cet article ?

L'accès à la totalité des fonctionnalités est réservé aux professionnels de la santé.

Si vous êtes un professionnel de la santé vous devez vous connecter ou vous inscrire gratuitement sur notre site pour accéder à la totalité de notre contenu.
Si vous êtes journaliste ou si vous souhaitez nous informer écrivez-nous à redaction@rmnet.be.

Derniers commentaires

  • Harry DORCHY

    13 septembre 2019

    INAMI, diabétologie, attribution des activités aux hôpitaux de référence.

    En diabétologie, l’INAMI a déjà, et depuis longtemps, défini l’attribution des activités aux différents hôpitaux (diabète de type 1), et aux omnipraticiens (diabète de type 2).

    L'INAMI intervient dans "les coûts du suivi des adultes diabétiques dans un centre spécialisés" et dans "les coûts pour le suivi des enfants et adolescents dans un centre spécialisé". Ces centres reçoivent un forfait journalier qui comprend le matériel pour l'autosurveillance glycémique ("test de piqûre au doigt" ou la mesure "continue" du glucose interstitiel par capteur), ainsi que le personnel (médecin(s), infirmière(s), diététicienne(s), psychologue(s), assistante(s) sociale(s), secrétaire(s) calculé en fonction du nombre de patients et du type de diabète. Pour un enfant ou adolescent avec un diabète de type 1 (DT1), avec capteur, mais sans pompe à insuline, le coût quotidien est de 8,30€ soit 3030€/an. Si on lui a prescrit une pompe à insuline (sans devoir justifier une amélioration de l'HbA1c et/ou de la qualité de vie!!!), le coût quotidien est 14,83€/jour, soit 5413€ par an par enfant ou adolescent (jusqu'à 18 ans). Pour les adultes avec un diabète de type 1, le coût est celui des enfants moins environ 2,2€/jour, car l'équipe d'encadrement prévue par l'INAMI est moindre que celle des enfants. Ceci hors indexation.

    D'après le Registre Belge du Diabète, en 2003, l'incidence du DT1 était de 10,5/100.000/an dans la tranche d'âge 0-39 ans. Chez les garçons de moins de 10 ans, l'incidence augmente de 8%/an.

    La Convention de diabétologie pédiatrique précise (art 11, §12): « Le non-respect du cadre requis au cours d’une année civile déterminée peut, à condition que l’établissement ait eu la possibilité d’en exposer les raisons, donner lieu à une résiliation de la présente convention et/ou, à titre de sanction pour l’établissement (sur la base d’une décision du Comité de l’assurance), à une récupération d’un pourcentage de l’intervention de l’assurance dans les prestations versées pour cette année civile, pourcentage qui peut atteindre le double du pourcentage du cadre du personnel manquant au cours de l'année civile en question. »

    Or, depuis des années, il semble n'y avoir aucun contrôle! Alors que c'était le cas pendant quelques années lors de la première Convention de 1987. Il fallait même fournir à l'INAMI, par courrier, la liste du personnel, avec noms, fonction, équivalents temps-plein, etc. Pourquoi n'est-ce plus le cas?

    Donc la tentation pourrait être, dans certains hôpitaux, de ne pas respecter le cadre requis et d'utiliser à d'autres usages l'argent des patients diabétiques.