«Le système devient instable et peut générer de l'anxiété à tous les niveaux» (Dr J. Brauner - MoDeS)

Le Dr Jonathan Brauner, administrateur délégué à la réforme de la nomenclature et à la réforme des hôpitaux du Monde des Spécialistes (MoDeS-Cartel) analyse les récents résultats de l’étude Maha de Belfius. Cet expert du financement hospitalier propose une augmentation « one shot » de l’enveloppe du BMF qui est sous-financée.

Le rapport Maha reflète à juste titre la situation désastreuse que nous vivons sur le terrain de par le manque de moyens mis sur la table par le gouvernement. Un point très alarmant est que tant de comptes soient dans le rouge malgré l’anticipation de nombreux gestionnaires hospitaliers pour faire face à cette inflation sans précédent. Cet élément souligne la criticité de la stabilité de nos institutions de soins, avec un risque sérieux qui pourrait impacter à court terme la qualité des soins. 

Par exemple, de nombreux projets sont reportés, certains investissements retardés, tant pour du matériel médical que pour les infrastructures… La situation est aussi critique puisqu’on assiste à une diminution du présentéisme suite à la crise du Covid avec les difficultés de recrutement que l’on connait pour le personnel infirmier, technologue… A cela s’ajoute une pression supplémentaire avec la cybersécurité, les multiples accréditations, les mises en réseaux… 

Baisse de l’attractivité médicale

Un autre élément dans ces perspectives concerne l’attractivité médicale, thématique régulièrement défendue par le Cartel. Sans investissement dans les nouvelles technologies de santé, notre système pourrait se dégrader et ne pas offrir les meilleurs soins possibles, avec certains médecins qui pourraient se détourner de l’hôpital. Et ceci sans discuter de l'impact sur les rétrocessions éventuellement. 

Le système devient instable et peut générer de l'anxiété à tous niveaux, délétère pour tous les acteurs de santé.

Sur le terrain, un contrôle plus minutieux de l’activité médicale a lieu, afin de mesurer l’apport de chacun en fonction de sa charge de travail. Tout est analysé. On peut certes travailler à l’optimisation des processus, améliorer toutes les facettes de la performance des institutions de soins. A un moment, quand l’optimum est atteint, difficile de faire mieux. Il existe certes encore quelques progrès à réaliser, mais le système risque de péricliter si aucune solution pérenne n’est dégagée. Rechercher l’efficience est opportun même s’il présente également des limites. 

Repenser le paradigme de l’hôpital

Le chemin le plus rationnel pour sortir la tête de l’eau fait l’objet d’un choix politique. Comme solution, citons une augmentation « one shot » de l’enveloppe du BMF que l’on sait sous-financée. Pour les honoraires, le mécanisme d’indexation doit être pensé pour faire face rapidement à l’inflation. C’est d’ailleurs une des thématiques de la discussion de l’accord médico-mutualiste… A suivre certainement. La réforme de la nomenclature permettra un meilleur ajustement du financement des actes, bien que l’enveloppe sera in fine, la même… 

Une autre voie serait de repenser le paradigme de l’hôpital, comme acteur dans un processus de soins, à l’instar de ce que l’on peut voir dans certains pays limitrophes.

Les élections s’annoncent prochainement, on passera début 2024 en affaires courantes, et il n’est pas exclu qu’il faille un temps certain pour la constitution d’un gouvernement, surtout lorsqu’on constate les forces politiques en présence et leur point de vue sur l’organisation des soins. 

Les institutions de soins sont fragilisées, et font figure de « géant au pied d’argile ». Sans boost politique, à très court terme, la situation va s’enliser, il sera difficile de redresser la situation sans un impact sur la qualité des soins, et donc pour tous les patients.

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Derniers commentaires

  • fabien polish

    24 novembre 2023

    La baisse d'attractivité médicale et le risque que les médecins se détournent des hôpitaux soulignent l'importance d'investir dans les nouvelles technologies de santé. La mention du contrôle minutieux de l'activité médicale et de la recherche constante de l'efficience témoigne des pressions actuelles sur les professionnels de la santé. fabien cbdtech